Nicolas Cinquini

les Français comprendront

Les politiciens occidentaux parlent beaucoup, en particulier les oligarques non élus de l’administration européenne, de vraies pipelettes. Dans ce flot d’ardentes professions de foi, certaines tirades sont dignes d’intérêt. Ce 15 février 2023, l’Espagnol Josep Borrell, Haut représentant de l’Union [européenne] pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a ouvert la bouche lors de la session plénière du parlement à Strasbourg. Chacun y trouvera du grain à moudre. Je laisse de côté les sonneries de clairon et roulements de tambour, m’intéresse plutôt à la façon dont Borrell perçoit la jungle [lui-même, fin 2022], depuis son jardin de l’Union européenne

[…] Nous devons être conscients de la façon dont le conflit ukrainien est vue hors de l’Europe. Tous ne partagent pas nos valeurs et idées […] Beaucoup de pays dans le monde ne supportent pas la position occidentale […] Ils considèrent l’inflation des prix de l’énergie et de l’alimentation comme une conséquence directe de nos sanctions contre la Russie […] Que nous le voulions ou pas, il existe des sentiments anti-coloniaux en Afrique et anti-impérialistes en Amérique Latine […] C’est pourquoi les populations de ces pays regardent ce conflit différemment de nous […]

Le 9 décembre 2022 déjà, l’anthropologue et historien Emmanuel Todd a soulevé que les valeurs, c’est comme la culture ou la confiture. Vous connaissez la suite, moins on en a, plus on les étale

Quelles seraient donc les valeurs que Borrell semble partager avec certains ? Pas la démocratie, aucun des technocrates européens, ni Borrell ni sa patronne allemande, Ursula von der Leyen, n’a été porté par le suffrage populaire pour donner des leçons à la terre entière. Ni la probité, les institutions européennes sont éclaboussées par un scandale de corruption et la vice-présidente grecque du parlement, Eva Kaili, certes élue, est aujourd’hui incarcérée en Belgique. Une supposition : celles du complexe militaro-industriel des États-unis, déjà un grand gagnant du conflit au Donbass et en Ukraine ? Une s’affirme clairement, l’arrogance. Borrell partage le monde entre une jungle et le jardin européen. Serait ce de l’atavisme ? Le souvenir des conquistadores, qui ont pillé et colonisé les sauvages d’Amérique ? Parfois, son mépris pour les vastes restes du monde et en particulier, sa russophobie, suggèrent même un lien affectif avec quelque ancien de la division Azul, que l’Armée rouge a malmenée dans la région de Leningrad, entre 1941 et 1943. Ces interprétations restent des suppositions

Les institutions européennes ne sont pas une passion, je ne connaissais pas Josep Borrell avant le début, le 24 février 2022, de l’opération militaire spéciale pour la libération du Donbass, la démilitarisation et la dénazification de l’Ukraine. Par goût et expérience, je m’intéresse plus aux faits de terrain, dont les crimes et le terrorisme. Le Haut représentant s’est vite imposé comme l’un des colpoteurs les plus zélés d’une propagande ukrainienne particulièrement grossière. À cet égard, son homologue ukrainien lui a formellement demandé en juin 2022 d’imposer une censure à des médias européens, qui hélas, n’ont pas besoin d’être poussés violemment

Son compte Twitter est un festival. Des crimes ukrainiens sous faux drapeau à Boutcha, fin mars début avril 2022, au massacre ciblé, par l’artillerie atlantiste, de prisonniers de guerre encombrants à Yelenovka, fin juillet, Borrell n’a raté aucune occasion d’exprimer sa valeur principale : le mensonge.

Et si cette hostilité était moins le résultat de l’inflation, que de la juste appréciation à travers l’Histoire, par l’immense majorité des vastes restes du monde, des valeurs que Josep Borrell partage encore aujourd’hui avec certains ?